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Scène première |
Le théâtre représente le parc de Chesnes. Béroé. |
Q
Béroé
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Ah ! n'est-ce pasassez qu'on aime et qu'on soupire,
pendant le cours do sa jeune saison !
Pourquoi faut-il, amour, étendre ton empire
jusque sur notre âge grison !
Malgré tous mes efforts, malgré toute mes feintes,
je sens vivre tes feux, sous mes cendres éteintes,
d'une cruelle ardeur je me vois consumer,
que la glace des ans ne fait que rallumer:
j'aime un dieu... Le voici, tâchons de le surprendre;
il rève à ses amours, cachons-nous pour l'entendre.
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Scène deuxième |
Vertumne, Béroé cachée. |
<- Vertumne
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VERTUMNE
Ô doux zéphirs
vous enflammez la terre
par vos soupirs,
et de vos pleurs
on voit dans ce parterre,
naître des fleurs.
Hélas ! ainsi que vous,
je suis tendre et fidèle.
Discret et doux;
et mes douleurs
ne touchent point la belle
pour qui je meurs.
| S
(♦)
(♦)
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Mais pourquoi tant gémir ! poursuis ton entreprise.
Lâche, c'est trop te plaindre, et soupirer en vain,
use de ton pouvoir divin,
joins à l'amour, la ruse et la surprise,
il faut l'attendre ici; dans ce bocage vert
elle cherche souvent le frais et le couvert.
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Scène troisième |
Vertumne, Béroé. |
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BÉROÉ |
Quoi, toujours inflexible ?
Toujours sourd à mes vœux;
et toujours amoureux
d'une belle insensible.
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VERTUMNE (à l'écart) |
Le ridicule objet !
L'enfer t'amène ici, pour troubler mon projet.
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BÉROÉ |
Quoi, tant d'amour, ingrat !
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VERTUMNE (à l'écart) |
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BÉROÉ |
(l'arrêtant)
Arrête et voi du moins ma peine et mes langueurs;
un moment encor et je meurs.
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VERTUMNE (à l'écart) |
Il faut l'épouvanter et lui donner la fuite.
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Vertumne se transforme en dragon et court à elle comme pour la dévorer. | Vertumne ->
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Scène quatrième |
Béroé, Vertumne en Dragon |
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BÉROÉ |
Que voyez-vous, mes yeux !
Quel dragon furieux !
Mais non, rassurons-nous, c'est lui qui se transforme
en ce monstre difforme.
(Elle affronte le dragon.)
Hé bien, cruel, saoule-toi de mon sang;
contente ton envie;
déchire-moi le flanc;
arrache-moi la vie:
je bénirai mon sort,
et je ne puis mourir d'une plus douce mort.
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Le ciel brille d'éclairs, le tonnerre gronde, la terre tremble, et douze folets transformés en fantômes tombent du ciel dans un nuage enflammé. | <- Cinq folets, Quatre folets, Trois folets
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Scène cinquième |
Béroé, Douze folets en fantômes |
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BÉROÉ |
Mais quels éclairs ! quelle horrible tonnerre !
Quel tremblement de terre !
Quels fantômes affreux, et quelles visions !
Que de monstres armez de feu. de fer, de foudre,
pour me réduire en poudre !
Je vous connais folets, et vos illusions,
vous croyez m'étonner par cette allarme feinte,
et me jouer à votre tour:
mais l'on ne peut former les glaces de là crainte,
où règnent les feux de l'amour.
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Les Folets descendus de la machine environnent Béroé, et pour l'épouvanter, dansent à ses yeux une danse terrible. | |
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BÉROÉ |
(après la danse dit aux fantômes)
Hé bien ! Folets, est-ce assez d'impostures;
de grimaces et de postures;
et croyez-vous encor sous ce masque trompeur,
me donner de la peur ?
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Trois fantômes disparaissent, quatre autres saisissent Béroé, l'emportent en l'air, et cinq autres restent sur le théâtre. | Trois folets ->
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BÉROÉ |
Au secours je suis morte,
on m'entraîne, on m'emporte.
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| Quatre folets, Béroé ->
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Scène sixième |
Cinq folets en fantômes, Le dieu des jardins, Quatre jardiniers. |
<- Le dieu des jardins, Quatre jardiniers
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LE DIEU DES JARDINS, LES JARDINIERS |
Pauvre nourrice, hélas ! tes cris sont superflus !
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Le dieu et sa troupe ne pouvant arracher la nourrice aux fantômes qui l'emportent, s'en veulent venger sur les cinq autres qui restent et crient: | |
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LE DIEU DES JARDINS |
Donnons, donnons, frappons dessus.
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Scène septième |
Le dieu des jardins, Quatre jardiniers, Cinq folets en Bourgeoises de Lampsaque. |
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LA 1ÈRE BOURGEOISE (au Dieu des jardins) |
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LE DIEU DES JARDINS (à la 1ère bourgeoise) |
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LE 1ER JARDINIER (à la 2me bourgeoise) |
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LE 2ME JARDINIER (à la 3me bourgeoise) |
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LE 3ME JARDINIER (à la 4me bourgeoise) |
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LA 5ME BOURGEOISE (au 4me jardinier) |
C'est toi, Philandre, hélas !
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LE 4ME JARDINIER (à la 5me bourgeoise) |
C'est toi, chère Cloris !
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LA 2ME BOURGEOISE (au 3me jardinier) |
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LE 3ME JARDINIER (à la 2me bourgeoise) |
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LA 3ME BOURGEOISE (au 4me jardinier) |
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LE 4ME JARDINIER (à la 3me bourgeoise) |
Ah Climeine !
O Dieux qui vous amène
eu ces bords étrangers !
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LA 3ME BOURGEOISE |
Le désir de revoir nos aimables bergers !
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LA 1ÈRE BOURGEOISE |
Depuis que vous cessez de cultiver nos terres,
la mousse et les buissons croissent dans nos parterres.
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LA 2ME BOURGEOISE |
On voit sur notre teint une jaune pâleur,
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LA 3ME BOURGEOISE |
nous n'avons plus de lys.
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LA 4ME BOURGEOISE |
Nous n'avons plus de roses.
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LA 5ME BOURGEOISE |
Et nos fleurs demi-closes,
frémissent de douleur.
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LE 3ME JARDINIER |
Depuis votre absence,
ce n'est que souffrance,
tristesse et langueur.
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LE 4ME JARDINIER |
Dès la moindre peine,
nous perdons haleine,
courage et vigueur.
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LE 3ME JARDINIER |
Nos peaux sont plus sèches,
que des parchemins.
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LE 3ME JARDINIER ET LE 4ME JARDINIER |
Et nos pauvres bêches
nous tombent des mains.
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LA 2ME BOURGEOISE |
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LE 1ER JARDINIER |
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TOUS |
Allons, bergers; allons bergères,
goûter la douceur du retour.
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LA 1ÈRE BOURGEOISE ET LA 2ME BOURGEOISE |
Allons sur les vertes fougères,
cueillir les doux fruits de l'amour.
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TOUS |
Allons sur les vertes fougères,
cueillir les doux fruits de l'amour.
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Le ieu des jardins et les Jardiniers veulent embrasser leurs bourgeoises mais dans le moment elles se transforment en autant de buissons d'épines. | |
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Scène huitième |
Le dieu des jardins, quatre jardiniers, Cinq folets en buissons d'epines. |
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LE DIEU DES JARDINS |
(et sa troupe en se piquant)
Peste ! quel changement, quelle métamorphose !
Ah ! nous trouvons l'epine, où nous cherchons la rose !
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Que viens-tu faire en ce lieu,
pauvre dieu ?
Tu brûles de vaines flammes,
et tu souffres cent mépris,
toi qui fus l'amour des dames.
Et la terreur des maris.
Est-ce à toi de soupirer ?
Et prier ?
Toi qu'à genoux on implore,
va soulager les désirs
de la belle qui t'adore,
et qui meurt pour tes plaisirs.
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DEUX FOLETS (cachés) |
Cesse, grand dieu, cesse tes plaintes vaines.
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LE DIEU DES JARDINS |
Qu'entends-je ? quelle voix sort des rives prochaines ?
Échos, arbres, rochers, est-ce vous, est-ce vous ?
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DEUX FOLETS (cachés) |
Nous sommes deux nymphes des chênes,
et le ciel t'annonce par nous,
qu'un jour il finira tes peines.
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LE DIEU DES JARDINS |
Hélas ! quand viendra-t-il ce bien heureux moment !
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DEUX FOLETS (cachés) |
Quand tu seras discret, et fidèle en aimant !
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LE DIEU DES JARDINS |
Taisez-vous, taisez-vous, impertinents oracles:
amour en ma faveur fait bien d'autres miracles,
apprenez, apprenez qu'en l'empire amoureux
on perd tout pour attendre;
et que le vigoureux
est souvent plus heureux,
que le sage et le tendre.
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LE DIEU DES JARDINS ET LES JARDINIERS
Apprenez, apprenez qu'en l'empire amoureux
on perd tout pour attendre;
et que le vigoureux
est souvent plus heureux,
que le sage et le tendre.
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