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Scène première |
Le thèâtre représent un appartement intérieur du temple destine aux victimes. Sur un des côtés ce trouve un autel. Oreste et Pylade, enchainés. |
Q
Oreste, Pylade
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PYLADE |
Quel silence effrayant ! quelle douleur funeste !
Quoi ! tu ne me réponds que par des longs sanglots ?
Que peut la mort sur l'âme des héros ?
Ne suis-je plus Pylade, et n'es-tu plus Oreste ?
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ORESTE |
Dieux ! à quelles horreurs m'aviez-vous réservé ?
D'un aveugle destin déplorable victime,
partout errant et partout réprouve,
mon sort est accompli, j'etais né pour le crime.
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PYLADE |
Que dis-tu ? quel est ce remord ?
Quel nouveau crime enfin ?
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ORESTE |
Je t'ai donné la mort.
Ce n'était pas assez que ma main meurtrière
eût plongé le poignard dans le cœur d'une mère.
Les dieux me réservaient pour un forfait nouveau:
je n'avais qu'un ami, je deviens son bourreau !
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Dieux qui me poursuivez, dieux, auteurs de mes crimes,
de l'enfer, sous mes pas, entrouvrez les abîmes;
ses supplices pour moi seront encore trop doux !
J'ai trahi l'amitié, j'ai trahi la nature,
des plus noirs attentats j'ai comblé la mesure.
Dieux, frappez le coupable et justifiez-vous !
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PYLADE |
Quel langage accablant pour un ami qui t'aime !
Reviens à toi, mourons dignes de nous:
cesse, dans ta fureur extrême,
d'outrager et les dieux, et Pylade, et toi-même.
Si le trépas nous est inévitable,
quelle vaine terreur te fait pâlir pour moi ?
Je ne suis pas si miserable,
puisqu'enfin je meurs près de toi !
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Unis dès la plus tendre enfance
nous n'avions qu'un même désir;
ah ! mon cœur applaudit d'avance
au coup qui va nous réunir;
le sort nous fait périr ensemble,
n'en accuse point la rigueur:
la mort même est une faveur,
puisque le tombeau nous rassemble.
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Scène deuxième |
Oreste, Pylade, un Ministre du sanctuaire, Gardes du temple. |
<- Le ministre, Gardes du temple
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LE MINISTRE |
Etrangers malheureux, il faut vous séparer !
(à Pylade)
Vous, suivez-moi !
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PYLADE, ORESTE |
Grands dieux ! qu'ordonnes-tu, barbare ?
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ORESTE |
(à Pylade)
Non, ne me quitte pas, ami fidèle et rare !
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PYLADE, ORESTE |
Cruels, faut-il vous implorer ?
(aux gardes)
Hâtez la mort qu'on nous prépare;
mais laissez-nous la recevoir tous deux.
Vos glaives, vos bûchers sont cent fois moins affreux
que le moment qui nous sépare !
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LE MINISTRE |
J'obéis â nos lois, j'obéis à nos dieux.
(aux gardes)
Qu'on le conduise !
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ORESTE |
(au Ministre)
Arrête !...
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PYLADE |
(s'arrachant avec peine des bras d'Oreste)
Hélas !
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| (Pylade, le Ministre et les gardes sortent.) | Pylade, Le ministre, Gardes du temple ->
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ORESTE |
Monstres sauvages.
On te l'enlève, hélas ! Pylade est mort pour toi...
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Scène troisième |
Oreste seul. |
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Dieux protecteurs de ces affreux rivages,
dieux avides de sang, tonnez, écrasez-moi !
Où suis-je ? à l'horreur qui m'obsède
quelle tranquillité succède ?
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Le calme rentre dans mon cœur...
Mes maux ont donc lassé la colère céleste,
je touche au terme du malheur !
Vous laissez respirer le parricide Oreste.
Dieux justes ! Ciel vengeur !
Oui, le calme rentre dans mon cœur...
| S
(♦)
(♦)
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Scène quatrième |
Les Euménides, Oreste. |
<- Les Euménides
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| (Les Euménides sortent du fond du thèâtre et entourent Oreste. Les unes exécutent autour de lui un ballet-pantomine de terreur; les autres lui parlent. Oreste est sence connaissance pendant toute cette scène.) | |
LES EUMÉNIDES |
Vengeons et la nature et les dieux en courroux !
Inventons des tourments... il a tué sa mère.
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ORESTE |
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LES EUMÉNIDES |
Point de grâce ! Il a tué sa mère !
Vengeons et la nature et les dieux en courroux !
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ORESTE |
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LES EUMÉNIDES |
Ils sont encore trop doux.
Vengeons et la nature et les dieux en courroux !
Il a tué sa mère !
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L'ombre de Clytemnestre paraît au milieu des furies et s'abîme aussitôt. | |
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ORESTE |
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LES EUMÉNIDES |
Point de grâce, il a tué sa mère !
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ORESTE |
Ayez pitié ! ayez pitié !
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LES EUMÉNIDES |
De la pitié ? le monstre ! il a tué sa mère !
Égalons, s'il se peut, sa rage meurtrière,
ce crime affreux ne peut être expié !
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ORESTE |
Ayez pitié ! dieux cruels !
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LES EUMÉNIDES |
Ton forfait ne peut être expié !
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Le portes de l'appatement s'ouvrent. Les Prêtresses paraissent, les Furies s'abîment sans pouvoir être aperçues. | |
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Scène cinquième |
Oreste, Iphigénie, Les Prêtresses. |
<- Les prêtresses, Deux prêtresses, Iphigénie
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ORESTE |
(apercevant Iphigénie)
Ma mère ! Ciel !
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IPHIGÉNIE |
(à Oreste)
Je vois toute l'horreur
que ma présence vous inspire.
Mais au fond de mon cœur,
etranger malheureux, si vos yeux pouvaient lire,
autant que je vous plains, vous plaindriez mon sort.
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ORESTE |
(à part)
Quels traits ! quel étonnant rapport !
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IPHIGÉNIE |
(aux Prêtresses)
Qu'on détache ses fers.
(à Oreste)
Quels bords vous ont vu naître ?
Que veniez-vous chercher dans ces climats affreux ?
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ORESTE |
(à part)
Quel vain désir vous porte à me connaître ?
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IPHIGÉNIE |
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ORESTE |
(à part)
Que lui répondre ? Ô dieux !
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IPHIGÉNIE |
D'où vient que votre cœur soupire ?
Qu'êtes-vous ?
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ORESTE |
Malheureux ! C'est assez vous en dire.
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IPHIGÉNIE |
De grâce, répondez: de quels lieux venez-vous ?
Quel sang vous donna l'être ?
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ORESTE |
Vous le voulez ? Mycènes m'a vu naître !
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IPHIGÉNIE |
Dieux, qu'entends-je ? Achevez, dites... informez-nous
du sort d'Agamemnon, de celui de la Grèce !
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ORESTE |
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IPHIGÉNIE |
D'où naît la douleur qui vous presse ?
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ORESTE |
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IPHIGÉNIE |
Je vois couler vos pleurs !
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ORESTE |
...sous un fer parricide est tombé !
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IPHIGÉNIE |
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ORESTE |
(à part)
Quelle est donc cette femme ?
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IPHIGÉNIE |
Et quel monstre exécrable
a sur un roi si grand osé lever le bras ?
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ORESTE |
Au nom des dieux, ne m'interrogez pas !
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IPHIGÉNIE |
Au nom des dieux, parlez !
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ORESTE |
Ce monstre abominable,
c'est...
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IPHIGÉNIE |
Achevez ! vous me faites frémir.
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ORESTE |
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IPHIGÉNIE |
Grands dieux ! Clytemnestre ?
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ORESTE |
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LES PRÊTRESSES |
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IPHIGÉNIE |
Et des dieux vengeurs la justice suprême
a vu ce crime atroce ?
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ORESTE |
(égaré)
Elle a su le punir.
Son fils...
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IPHIGÉNIE |
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ORESTE |
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IPHIGÉNIE, LES PRÊTRESSES
De forfaits sur forfaits quel assemblage affreux !
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Ensemble
ORESTE
De mes forfaits quel assemblage affreux !
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IPHIGÉNIE |
Et ce fils qui du ciel a servi la colère,
ce fatal instrument de la vengeance des dieux...
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ORESTE |
A rencontré la mort qu'il a longtemps cherchée.
Electre dans Mycènes est seule demeurée.
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IPHIGÉNIE |
(se ritirant sur un des côtés de la scène)
C'en est fait ! Tous les miens ont subi le trépas.
Tristes pressentiments, vous ne me trompez pas.
(à Oreste)
Eloignez-vous, je suis assez instruite.
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| (Deux Prêtresses accompagnent Oreste.) | Deux prêtresses, Oreste ->
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Scène sixième |
Iphigénie, Les Prêtresses. |
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IPHIGÉNIE |
Ô ciel ! de mes tourments la cause et le témoin,
jouissez des malheur où vous m'avez réduite;
il ne pouvait aller plus loin.
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CHŒUR DES PRÊTRESSES
Patrie infortunée,
où par des noeuds si doux
notre âme est enchaînée,
vous avez disparu pour nous.
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IPHIGÉNIE |
Ô malheureuse Iphigénie !
Ta famille est anéantie !
(aux Prêtresses)
Vous n'avez plus de rois, je n'ai plus de parents;
mêlez vos cris plaintifs à mes gémissements !
| S
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LES PRÊTRESSES |
Mêlons nos cris plaintifs à ses gémissements !
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IPHIGÉNIE |
Vous n'avez plus de rois, je n'ai plus de parents.
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LES PRÊTRESSES |
Nous n'avions d'espérance, hélas ! que dans Oreste:
nous avons tout perdu, nul espoir ne nous reste.
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IPHIGÉNIE |
Honorez avec moi ce héros qui n'est plus;
du moins qu'aux mânes de mon frère
les derniers devoirs soient rendus !
Apportez-moi la coupe funéraire,
offrons à cette ombre si chère
les froids honneurs qui lui sont dus.
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| (On apporte la coupe et l'on commence les cérémonies funèbres.) | |
LES PRÊTRESSES |
Contemplez ces tristes apprêts,
mânes sacrés, ombre plaintive,
que nos larmes, que nos regrets,
pénètrent l'infernale rive !
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IPHIGÉNIE |
Ô mon frère, daignez entendre
les accents de ma douleur;
que les regrets de ta sour
jusqu'à toi puissent descendre !
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LES PRÊTRESSES |
Contemplez ces tristes apprêts,
mânes sacrés, ombre plaintive,
que nos larmes, que nos regrets,
pénètrent l'infernale rive !
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