Acte deuxième

 
[N. 7 - Entr'acte et Air]

 N 

 
N. 7.a - Entr'acte
Le château et les jardins de Chenonceaux, à trois lieues d'Amboise. - Le château de Chenonceaux est bâti sur un pont, en perspective. Le fleuve serpente en lignes courbes jusque sur le milieu du théâtre, disparaissant de temps en temps derrière des touffes d'arbres verts. À droite, un large escalier en pierre par lequel on descend du château dans les jardins. - Marguerite est entourée de ses femmes; elle vient d'achever sa toilette et Urbain, son page, à genoux devant elle, tient encore son miroir.

 Q 

 

Scène première

Marguerite, Urbain, Demoiselles d'honneur.

Marguerite, Urbain, Demoiselles d'honneur

 
N. 7.b - Air

MARGUERITE

Ô beau pays de la Touraine !    

Riants jardins, verte fontaine,

ruisseau qui murmures à peine,

que sur tes bords j'aime à rêver !

Belles forêts, sombre feuillage,

cachez-moi bien sous votre ombrage,

et que la foudre ou que l'orage

jusqu'à moi ne puisse arriver !

S

Sfondo schermo () ()

 

 

Que Luther ou Calvin ensanglantent la terre  

de leurs débats religieux;

des ministres du ciel que la morale austère

nous épouvante au nom des cieux;

raison austère,

humeur sévère,

ne règnent guère

dans notre cour !

Sous mon empire,

on ne respire

que pour sourire

au dieu d'amour.

 

LE CHŒUR

Sombre folie,

ou pruderie,

soyez bannie

de ce séjour !

Sous son empire,

on ne respire

que pour sourire

au dieu d'amour.

MARGUERITE

Oui, je veux chaque jour

aux échos d'alentour

redire nos refrains d'amour:

écoutez... écoutez... les échos d'alentour

ont appris nos refrains d'amour.

(l'orchestre imite l'écho dont Marguerite répète les sons)

Amour !... amour !...

Oui, déjà la fauvette

dans les airs le répète,

et des tendres ramiers les sons mélodieux

se perdent en mourant sur les flots amoureux.

Sombre folie,

ou pruderie,

soyez bannie

de notre cour !

Sous notre empire,

on ne respire

que pour sourire

au dieu d'amour.

 
N. 7.c - Cabalette

A ce mot seul s'anime et renaît la nature,

les oiseaux l'ont redit sous l'épaisse verdure;

le ruisseau le répète avec un doux murmure;

les ondes, la terre et les cieux

redisent nos chants amoureux

 

URBAIN

(à part, la regardant et soupirant)  

Que notre reine est belle, hélas ! et quel dommage !

MARGUERITE

Eh ! de quoi te plains-tu ?

URBAIN

De n'être rien - qu'un page !

Page discret, et fidèle, et soumis !

MARGUERITE

(souriant et montrant ses demoiselles d'honneur)

De ces dames pourtant ce n'est pas là l'avis !

URBAIN

(vivement)

Ah ! madame !

MARGUERITE

(s'asseyant nonchalamment)

Tais-toi ! - La journée est brûlante,

et du soleil d'août la chaleur accablante !

(a ses femmes)

Sous ce riant feuillage, et dans le sein des eaux

dont le Cher embellit les bords de Chenonceaux,

nous irons, quand du jour s'amortira l'ardeur,

d'un bain délicieux savourer la fraîcheur.

Allez, disposez tout.

 
(Les femmes sortent toutes par la gauche, et au haut du grand escalier à droite, on voit paraître Valentine.)

Demoiselles d'honneur ->

 

MARGUERITE

(à Urbain)  

Qui vient là, je vous prie ?

URBAIN

De vos demoiselles d'honneur

la plus jeune et la plus jolie.

MARGUERITE

C'est Valentine !

 

Scène deuxième

Les mêmes, Valentine.

<- Valentine

 

MARGUERITE

Approche sans frayeur.  

URBAIN

A la cour arrivée à peine,

déjà de notre souveraine

elle est la favorite !

MARGUERITE

Oui, je l'ai vue gémir,

et les pleurs ont toujours le don de m'attendrir.

URBAIN

(a part)

Ah !... je ne rirai plus.

MARGUERITE

(à Valentine)

Ma fille, allons, courage !

Dis-moi le résultat de ton hardi voyage.

VALENTINE

Le comte de Nevers sur l'honneur a promis

de refuser ma main.

MARGUERITE

Alors tout est facile,

et je te réponds, moi... sans être bien habile,

qu'un autre hymen bientôt...

VALENTINE

(troublée)

Ô ciel !

MARGUERITE

(souriant)

Quoi ! tu rougis.

(Valentine baisse les yeux)

Ah ! tu l'aimes donc bien !... et pourquoi t'en défendre ?

Mérite-t-il du moins un intérêt si tendre ?

Mon beau page, toi qui l'as vu,

réponds pour elle, qu'en dis-tu ?

URBAIN

Autant que chevalier de France

il a l'air noble et généreux.

MARGUERITE

L'un pour l'autre le ciel vous a faits tous les deux.

VALENTINE

Non, madame, le ciel proscrit cette alliance:

nos cultes sont différents.

MARGUERITE

Oh ! l'amour ne connaît ni les dieux ni les rangs.

URBAIN

(regardant Marguerite)

Quoi ! l'amour ne connaît ni les dieux ni les rangs ?

MARGUERITE

Et pour moi catholique... un hymen se prépare,

c'est un secret... avec Henri, roi de Navarre,

un des chefs protestants.

URBAIN

(avec douleur)

Ô ciel ! pour vous, madame, un hymen se prépare !

MARGUERITE

(le regardant)

Qu'avez-vous donc ?

URBAIN

(soupirant)

Moi ? rien.

MARGUERITE

(avec intérêt)

Pauvre Urbain !

(à Valentine)

Et j'entends

que votre hymen se fasse en même temps.

VALENTINE

Oh ! c'est impossible... et mon père ?

MARGUERITE

Je l'ai vu, je dois croire à ses nobles serments.

VALENTINE

(timidement)

Oui !... mais Raoul ?

MARGUERITE

Eh bien ! ma chère,

il va venir.

VALENTINE

(effrayée)

O ciel ! jamais je n'oserai...

MARGUERITE

(souriant)

Vraiment... jamais ?

(gaiement)

Alors c'est moi qui le verrai.

 

Scène troisième

Les mêmes; les Demoiselles d'honneur qui reviennent.

<- Demoiselles d'honneur

 

UNE DEMOISELLE D'HONNEUR

Venez sous ces épais ombrages  

chercher un doux abri contre un soleil brûlant.

Le fleuve fortuné qui baigne ces rivages

vous offre de ses eaux le rempart transparent.

 
[N. 8 - Chœur des baigneuses (dansé)]

 N 

 

LE CHŒUR

Jeunes beautés, sous ce feuillage  

qui vous présente un doux ombrage,

bravez le jour et la chaleur.

Voyez ce ruisseau qui murmure,

et dans le sein d'une onde pure

cherchez le calme et la fraîcheur.

 

MARGUERITE

(remerciant les femmes empressées autour d'elle)  

C'est bien, c'est bien, et de vos soins fidèles...

(se retournant et apercevant Urbain qui est pensif et immobile devant elle)

Eh ! que faites-vous là, maître Urbain ?

URBAIN

J'attendais

les ordres de madame.

MARGUERITE

Et moi qui l'oubliais !...

Je le confondais presque avec ces demoiselles.

Sortez, beau page, et sur-le-champ.

URBAIN

Quel ennui de sortir dans un pareil moment !

(il sort en retournant plusieurs fois la tête)

Urbain ->

 

LE CHŒUR

Jeunes beautés, sous ce feuillage

qui vous offre un discret ombrage,

bravez le jour et la chaleur.

Voyez ce ruisseau qui murmure,

et dans le sein d'une onde pure

cherchez le calme et la fraîcheur.

 
Pendant ce chœur toutes les jeunes filles s'occupent de leur toilette de bain. Plusieurs, qui sont déjà prêtes, paraissent en peignoirs de gaze, et, avant de se plonger dans l'eau, dansent, jouent, courent les unes après les autres et forment différents groupes. - Divertissement que la reine contemple en souriant, nonchalamment étendue sur un banc de verdure. - D'autres jeunes filles ont disparu derrière les touffes d'arbres du fond, et on les voit un instant après se baigner dans le Cher, qui forme sur le théâtre différentes sinuosités. - En ce moment Urbain paraît au milieu des groupes que forment les jeunes filles.

<- Urbain

 

MARGUERITE

(l'apercevant)  

Encore ! et quelle audace ! Urbain !

URBAIN

(timidement)

Ce n'est pas moi:

(entrant)

c'est un beau chevalier que vers vous on amène.

 
(Valentine et toutes les jeunes filles effrayées se groupent en désordre auprès de la reine.)
 

MARGUERITE

Un chevalier !

URBAIN

Mais calmez votre effroi:

docile aux ordres de la reine,

un voile épais couvre ses yeux.

MARGUERITE

(à Valentine)

C'est Raoul de Nangis.

URBAIN

Héros mystérieux,

qui ne sait pas encore en quel piège on l'entraîne.

MARGUERITE

A merveille... c'est lui... tout sourit à mes vœux.

VALENTINE

Ah ! fuyons ses regards !

MARGUERITE

(la retenant)

Non... reste !... je le veux !

 

Scène quatrième

Les mêmes; Raoul que l'on amène avec un bandeau sur les yeux et qui descend du grand escalier à droite. Toutes les jeunes filles le montrent du doigt ou viennent doucement et sur la pointe des pieds le regarder, et s'enfuient, d'autres s'approchent et l'entourent.

<- Raoul

 
[N. 9 - Scène du bandeau]

 N 

 

LE CHŒUR

(à demi-voix)  

Le voici ! du silence !

En tremblant il s'avance,

et peut-être il a peur.

C'est charmant ! quel bonheur !

Sous ce voile léger

s'il savait quel danger

le menace en ces lieux,

il serait trop heureux !

Mais la foi du serment

contre lui nous défend.

Et gaîment nous soustrait

à son œil indiscret.

 

URBAIN

(pendant ce temps, regardant non pas Raoul mais la reine et le groupe de jeunes filles)

Grâce à lui l'on m'oublie, et je puis en ces lieux.

(montrant les jeunes filles)

Contempler les dangers qu'on dérobe à ses yeux.

MARGUERITE

(montrant Raoul et faisant signe à tout le monde de s'éloigner)

Il faut que je lui parle... Allez, et laissez-nous.

URBAIN

(regardant Raoul)

Ah ! d'un pareil destin qui ne serait jaloux !

 

LE CHŒUR

Oui, partons en silence;

son cœur tremble d'avance,

et peut-être il a peur.

C'est charmant ! quel bonheur !

Sous ce voile léger

s'il savait quel danger

le menace en ces lieux,

il serait trop heureux !

Mais la foi du serment

(montrant Marguerite)

contre lui la défend,

et gaîment la soustrait

à son œil indiscret.

 
(Tout le monde sort.)

Valentine, Urbain, Demoiselles d'honneur ->

 

Scène cinquième

Marguerite, Raoul, ayant toujours un bandeau sur les yeux.

 

MARGUERITE

Pareille loyauté mérite récompense.  

Nous sommes seuls, beau chevalier,

et je veux bien, dans ma clémence,

de vos serments vous délier.

Otez ce voile !

RAOUL

(arrachant le bandeau et regardant autour de lui)

O ciel ! où suis-je ?

De mes yeux éblouis n'est-ce pas un prestige ?

 
[N. 10 - Duo]

 N 

 
N. 10.a Duo, 1re partie

 

Beauté divine, enchanteresse,  

ô vous qui régnez en ces lieux,

répondez, mortelle ou déesse,

suis-je sur terre ou dans les cieux ?

MARGUERITE

(le regardant)

Ah ! de l'objet de sa tendresse

je conçois le trouble amoureux.

Il est fort bien; reine ou princesse

en aucun temps n'eût choisi mieux.

RAOUL

Ah ! je ne sais à votre vue

quel charme subjugue mon cœur !

MARGUERITE

(à part)

Vraiment !... et sans être connue !

Pour une reine c'est flatteur !

 

RAOUL

(s'animant)  

D'un chevalier fidèle acceptez le servage.

MARGUERITE

(souriant)

De son obéissance il me faudrait un gage.

RAOUL

Ah ! je le jure à vos genoux,

à vos ordres soumis, parlez, je suis à vous;

vos vœux je les remplirai tous.

MARGUERITE

(s'arrêtant et le regardant en hésitant un peu)

Ah !... Ah !...

 
N. 10.b Duo 2me partie

MARGUERITE

(à part)  

Si j'étais coquette,

pareille conquête

serait bientôt faite;

mais non !... et je doi,

alors que sa belle

compte sur mon zèle,

lui plaire pour elle

et non pas pour moi !

J'aime cette ardeur qui l'enflamme;

mais calmez-vous, car mes seuls vœux

sont ici de vous rendre heureux.

Ensemble

RAOUL

(à part)

Oui, cette conquête

va par sa défaite

punir la coquette

qui trahit ma foi.

Une ardeur nouvelle

m'enflamme pour elle,

et mon cœur fidèle

vivra sous sa loi.

(à haute voix, avec chaleur)

A vous et ma vie et mon âme !

A vous mon épée et mon bras !

Pour son dieu, l'honneur et sa dame,

heureux qui brave le trépas !

 

RAOUL

(étonné)

Que dites-vous ?

MARGUERITE

Tels sont mes ordres rigoureux.

Mais il faut m'obéir.

RAOUL

Je le jure, madame.

MARGUERITE

(avec satisfaction)

C'est bien, c'est tout ce que je veux.

(à part, le regardant avec un léger soupir)

Ah !...

MARGUERITE

Si j'étais coquette,

pareille conquête

serait bientôt faite;

mais, non !... et je doi,

alors que sa belle

compte sur mon zèle,

lui plaire pour elle

et non pas pour moi !

Ensemble

RAOUL

Oui, cette conquête

va par sa défaite

punir la coquette

qui trahit ma foi.

Une ardeur nouvelle

m'enflamme pour elle,

et mon cœur fidèle

vivra sous sa loi.

 
 

Scène sixième

Les mêmes, Urbain.

<- Urbain

 
[N. 11 - Récitatif et Entrée de la cour]

 N 

 

URBAIN

Madame !  

MARGUERITE

(avec impatience)

Allons ! il est dit que ce page

doit aujourd'hui toujours me déranger.

URBAIN

Pardon !

Les seigneurs du pays, par vos ordres, dit-on,

appelés en ces lieux, viennent pour rendre hommage

à votre majesté.

RAOUL

(étonné et s'éloignant de Marguerite avec effroi et respect)

Ciel !

MARGUERITE

(se rapprochant de lui, lui dit avec douceur)

C'est la vérité.

(regardant en riant son air interdit)

Eh bien ! qu'est devenue une ardeur aussi belle ?

Songez à vos serments... ce mot de majesté

vous a-t-il dispensé déjà d'être fidèle ?

RAOUL

Jamais !

MARGUERITE

Vous promettez de m'obéir... Eh bien !

je veux former pour vous un illustre lien.

De ma mère et du roi les desseins politiques

veulent aux protestants unir les catholiques.

Et je sers leurs efforts en vous donnant ici

une riche héritière, aimable, et seule fille

du comte de Saint-Bris votre ancien ennemi.

Je l'ai fait pressentir; il consent, et c'est lui

qui veut bien, oubliant ses haines de famille,

venir à vous.

RAOUL

Qui ? lui ?

MARGUERITE

(avec dignité)

Songez à votre tour

que j'ai votre serment, et l'ordre que je donne...

RAOUL

(s'inclinant)

J'obéirai.

MARGUERITE

C'est bien. A ce prix, à ma cour

je vous attache ainsi qu'à ma personne.

RAOUL

(baisant sa main qu'elle lui présente)

C'est trop de bontés !

URBAIN

(soupirant)

Oui, trop bonne, je le voi,

pour tout le monde, hormis pour moi.

 

Scène septième

Les mêmes, Seigneurs et Dames, Saint-Bris, de Nevers, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, puis Marcel

<- Seigneurs, Dames, Saint-Bris, De Nevers, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, Quelques demoiselles d'honneur

 

LE CHŒUR

(saluant Marguerite)  

Honneur à la plus belle !

Quand elle nous appelle,

hâtons-nous d'accourir.

Sa voix s'est fait entendre;

et près d'elle se rendre,

c'est voler au plaisir.

 

MARGUERITE

(montrant Raoul et s'adressant à tous les seigneurs)

Oui, d'un heureux hymen préparé par mes soins

j'ai désiré, messieurs, que vous fussiez témoins.

(pendant la reprise du chœur suivant, elle présente Raoul aux comtes de Saint-Bris et de Nevers; ceux-ci, les yeux fixés sur la reine, lui font bon accueil et lui tendent la main)

 

LE CHŒUR

Honneur à la plus belle !

Quand elle nous appelle,

hâtons-nous d'accourir.

Sa voix s'est fait entendre;

et près d'elle se rendre,

c'est voler au plaisir.

 
(À la fin du chœur, entre Marcel qui parle bas à l'oreille de Raoul.)

<- Marcel

 

MARCEL

Ah ! qu'est-ce que j'apprends ? Vous avez recherché  

la main d'une Madianite ?

RAOUL

Tais-toi !...

MARCEL

Dans ses jardins le serpent d'Ève habite

et sa maison est celle du péché...

 
(Raoul l'interrompt et lui fait signe de se taire. - Un valet en courrier et aux livrées de la cour a remis à Marguerite plusieurs papiers qu'elle lit. - Puis elle s'approche de Saint-Bris et de de Nevers et leur montre un ordre qu'elle leur donne.)

<- Le valet

Le valet ->

 

MARGUERITE

(bas à Saint-Bris et à de Nevers)

Mon frère Charles neuf, qui connaît votre zèle,

tous les deux, à Paris, dès ce soir vous appelle,

pour un vaste projet que j'ignore.

SAINT-BRIS, DE NEVERS

À sa loi

nous nous soumettons.

MARGUERITE

Oui ! mais d'abord à la mienne

il vous faut obéir, et je veux devant moi

que, grâce à cet hymen, abjurant toute haine

vous prononciez tous trois, comme aux pieds des autels,

d'une éternelle paix les serments solennels.

 
[N. 12 - Finale]

 N 

 
N. 12.a - Serment

RAOUL, SAINT-BRIS, DE NEVERS

(étendant la main)  

Par l'honneur, par le nomque portaient mes ancêtres,

par le roi, par ce fer à mon bras confié,

par le dieu qui connaît et qui punit les traîtres,

devant vous nous jurons éternelle amitié.

RAOUL

Si l'un de nous ose y porter atteinte...

SAINT-BRIS

Que le poignard venge sa trahison !

DE NEVERS

Oui, de son sang que la terre soit teinte !

SAINT-BRIS

Qu'il n'ait de nous ni trêve ni pardon !

LE CHŒUR

(répétant)

Par l'honneur, par le nomque portaient mes ancêtres,

par le roi, par ce fer à mon bras confié,

par le dieu qui connaît et qui punit les traîtres,

devant vous nous jurons éternelle amitié.

 
N. 12.b - Scène

MARGUERITE

(gaiement à Raoul)  

Et maintenant à votre vue

je dois offrir

votre charmante prétendue,

qui rendra vos serments faciles à tenir.

 
(Elle fait signe à quelques demoiselles d'honneur qui sortent.)

Quelques demoiselles d'honneur ->

 

Scène huitième

Les mêmes, Valentine couverte d'un voile blanc et amenée par plusieurs demoiselles d'honneur.

<- Valentine, Quelques demoiselles d'honneur

 

MARGUERITE

Votre compagne, la voilà;  

et des mains de son père, ici recevez-la.

 
(Saint-Bris a pris la main de Valentine et l'amène à Raoul qui la regarde.)
 

RAOUL

Ah ! grand dieu ! qu'ai-je vu ?

MARGUERITE

Qu'avez-vous ?

RAOUL

Quoi ! c'est elle

que m'offraient en ce jour...

MARGUERITE

Et l'hymen et l'amour.

RAOUL

Quoi ! c'est là, dites-vous, ma compagne fidèle ?

Trahison ! perfidie !

TOUS

Ah ! grand dieu ! quel transport !

RAOUL

Moi, son époux ?... jamais !

MARGUERITE, VALENTINE

O ciel !

RAOUL

Plutôt la mort !

 

SAINT-BRIS, DE NEVERS

Ah ! je tremble et frémis et de honte et de rage,  

c'est à moi d'immoler l'ennemi qui m'outrage:

c'est son sang qu'il me faut, en ma juste fureur,

pour punir son affront et venger mon honneur.

RAOUL

Trahison ! perfidie ! à ce point l'on m'outrage !

Je repousse à jamais un honteux mariage.

Plus d'hymen, je l'ai dit, et, fidèle à l'honneur,

je me ris désormais de leur vaine fureur.

Ensemble

VALENTINE

Et comment ai-je donc mérité cet outrage ?

Dans mon cœur éperdu s'est glacé mon courage;

il faut perdre à la fois son amour et l'honneur,

et pour moi désormais plus d'espoir, de bonheur !

 
N. 12.c - Strette

MARGUERITE

Ô transport ! ô démence ! et d'où vient cet outrage ?  

A briser de tels nœuds quel délire l'engage ?

Et d'un autre penchant le pouvoir séducteur

viendrait-il tout à coup s'emparer de son cœur ?

LE CHŒUR

Ô transport ! ô délire ! et d'où vient cet outrage ?

Et pourquoi rompre ainsi le serment qui l'engage ?

Cet affront veut du sang;

(montrant Saint-Bris)

et sa juste fureur

doit punir un perfide et venger son honneur.

Ensemble

MARCEL

Oui, mon cœur applaudit à son noble courage:

il repousse à jamais un fatal mariage,

à son culte fidèle, et fidèle à l'honneur.

Je me ris maintenant de leur vaine fureur.

 

MARGUERITE

(à Raoul)

Un semblable refus...

RAOUL

N'est que trop légitime.

MARGUERITE

Dites-m'en la raison.

RAOUL

Je ne le puis sans crime.

VALENTINE

Qu'ai-je fait ?

RAOUL

Par égard, je veux me taire encor;

mais cet hymen...

MARGUERITE

(avec colère)

Raoul !

RAOUL

Disposez de mon sort;

mais je l'ai dit: jamais ! jamais !... plutôt la mort !

DE NEVERS, SAINT-BRIS

C'en est trop ! je frémis de colère et de rage,

c'est à moi d'immoler l'ennemi qui m'outrage

c'est son sang qu'il me faut, en ma juste fureur,

pour punir son affront et venger mon honneur.

RAOUL

Trahison ! perfidie ! à ce point l'on m'outrage !

Je repousse à jamais un honteux mariage.

Plus d'hymen, je l'ai dit, et, fidèle à l'honneur,

je me ris désormais de leur vaine fureur.

MARCEL

Oui, mon cœur applaudit à son noble courage:

il repousse à jamais un fatal mariage,

à son culte fidèle, et fidèle à l'honneur.

Je me ris maintenant de leur vaine fureur.

Ensemble

VALENTINE

Et comment ai-je donc mérité cet outrage ?

Dans mon cœur éperdu s'est glacé mon courage;

il faut perdre à la fois son amour et l'honneur,

et pour moi désormais plus d'espoir, de bonheur !

MARGUERITE

Ô transport ! ô démence ! et d'où vient cet outrage ?

A briser de tels nœuds quel délire l'engage ?

Et d'un autre penchant le pouvoir séducteur

viendrait-il tout à coup s'emparer de son cœur ?

LE CHŒUR

Ô transport ! ô délire ! et d'où vient cet outrage ?

Et pourquoi rompre ainsi le serment qui l'engage ?

Cet affront veut du sang;

(montrant Saint-Bris)

et sa juste fureur

doit punir un perfide et venger son honneur.

 

DE NEVERS, SAINT-BRIS

(à Raoul qui s'apprête à les suivre)

Sortons ! sortons ! qu'il tombe sous nos coups !

RAOUL

D'un tel honneur mon cœur est plus jaloux.

MARGUERITE

Arrêtez ! Devant moi quelle insulte nouvelle !

(faisant signe à un des officiers de désarmer Raoul)

Vous, Raoul votre épée.

(à Saint-Bris et de Nevers)

Et vous, oubliez-vous

qu'à l'instant près de lui votre roi vous rappelle ?

RAOUL

Je les suivrai.

MARGUERITE

Non pas ! près de moi, dans ces lieux

vous resterez.

SAINT-BRIS

Le lâche est trop heureux

(montrant la reine)

que cette main royale ait un tel privilége !

RAOUL

En désarmant mon bras c'est vous qu'elle protége,

et peut-être trop tôt je serai près de vous.

MARGUERITE

Téméraires ! Tous deux redoutez mon courroux !

SAINT-BRIS

C'est en vain qu'on prétend enchaîner mon courage,

je saurai retrouver l'ennemi qui m'outrage.

(prenant la main de Valentine)

Viens, partons, c'est à moi, dans ma juste fureur,

à punir son offense, à venger notre honneur !

VALENTINE

Dieu puissant ! ai-je donc mérité cet outrage ?

Dans mon cœur éperdu s'est glacé mon courage;

il faut perdre à la fois son amour et l'honneur,

et pour moi désormais plus d'espoir, de bonheur !

MARCEL

Oui, mon cœur applaudit à son noble courage:

il repousse à jamais un fatal mariage,

à son culte fidèle, et fidèle à l'honneur.

Je me ris maintenant de leur vaine fureur.

SAINT-BRIS, DE NEVERS

Partons, partons, éloignons-nous,

rien ne pourra le soustraire à nos coups !

Ensemble

RAOUL

Vainement l'on prétend retenir mon courage,

je saurai retrouver l'ennemi qui m'outrage.

Oui, plus tard je saurai par ma seule valeur

repousser son offense et venger mon honneur !

MARGUERITE

Ô transport ! ô délire ! et d'où vient cet outrage

à briser de tels nœuds quel délire l'engage ?

Et d'un autre penchant le pouvoir séducteur

viendrait-il tout à coup s'emparer de son cœur ?

LE CHŒUR

Ô transport ! ô délire ! et d'où vient cet outrage ?

Et pourquoi rompre ainsi le serment qui l'engage ?

Cet affront veut du sang;

(montrant Saint-Bris)

et sa juste fureur

doit punir un perfide et venger son honneur.

 
(Saint-Bris et de Nevers entraînent Valentine à moitié évanouie et sortent en défiant Raoul, qui veut les suivre, et que retiennent les soldats de la reine. Tout le monde se sépare dans le plus grand désordre.)

Saint-Bris, De Nevers, Valentine ->

 
 

Variante

Acte deuxième, scène troisième.
Ce morceau ne figure pas dans la partition originale. Il fut composé par Meyerbeer en 1848 à l’attention de la célébrissime Marietta Alboni qui se voit confier le rôle d’Urbain pour des représentations londoniennes.

 
[N. 8 bis - Rondo du page]

 N 

URBAIN

Non, vous n’avez jamais je gage  

non rien appris de tel

par la voix du jeune page,

ah ! non, et les filles du village

jamais n’oublieront ce trait.

Entouré de gens sans nombre,

sur ses yeux un voile sombre,

un beau cavalier paraît;

glissant comme une ombre, il passe

et d’un pied léger franchit l’espace

et jeunes et vieux,

le suivant des yeux

disent: Quel est-il ?

Et puis, où va-t-il ?

Et que cherche-t-il ?

C’est un grand babil !

Non, vous n’avez jamais je gage,

etc.

LE CHŒUR

Chut ! quel bon tour !

Mais ne rions que sous cape

c’est un secret qui nous échappe !

On doit taire

doux mystère

où perce un tendre amour,

l’amour même

roi suprême

sous l’ombrage

de ces chênes

tient sa cour,

un secret à nos yeux

est caché dans ce jour;

que penser ? cherchons bien

c’est un jeu de l’amour.

Ah bien ! oui c’est un jeu

du malin dieu d’amour,

car l’amour dans ces prés,

dans ces bois tient sa cour.

 

URBAIN, LE CHŒUR

Le cavalier n’y voit goutte;

il cherche à tâtons sa route,

le cou tendu,

les enfants mutins,

l’agaçent des mains.

Leur rieuses sœurs

lui jettent des fleurs !

Non, vous n’avez jamais je gage,

etc.

C’est un cortège riant et beau,

le cavalier sous son bandeau

suivi, pressé des jeunes filles du hameau,

s’avance, approche du château,

ah ! quelle fête pour le château.

C’est lui il vient ici !

Ah ! le voici !

 

Fin (Acte deuxième)

Acte premier Acte deuxième Acte troisième Acte quatrième Acte cinquième

[N. 7 - Entr'acte et Air]

Le château et les jardins de Chenonceaux.

Marguerite, Urbain, Demoiselles d'honneur
 
Marguerite, Le chœur, Urbain
Ô beau pays de la Touraine !

Que Luther ou Calvin ensanglantent la terre

 

Que notre reine est belle, hélas ! et quel dommage !

Marguerite, Urbain
Demoiselles d'honneur ->

Qui vient là, je vous prie ?

Marguerite, Urbain
<- Valentine

Approche sans frayeur

Marguerite, Urbain, Valentine
<- Demoiselles d'honneur

Venez sous ces épais ombrages

[N. 8 - Chœur des baigneuses (dansé)]

C'est bien, c'est bien, et de vos soins fidèles...

Marguerite, Valentine, Demoiselles d'honneur
Urbain ->
 
Marguerite, Valentine, Demoiselles d'honneur
<- Urbain

Encore ! et quelle audace ! Urbain !

Marguerite, Valentine, Demoiselles d'honneur, Urbain
<- Raoul

[N. 9 - Scène du bandeau]

Le chœur, Urbain, Marguerite
Le voici ! du silence !
Marguerite, Raoul
Valentine, Urbain, Demoiselles d'honneur ->

Pareille loyauté mérite récompense

[N. 10 - Duo]

D'un chevalier fidèle acceptez le servage

Marguerite, Raoul
Si j'étais coquette
Marguerite, Raoul
<- Urbain

[N. 11 - Récitatif et Entrée de la cour]

Madame ! / Allons ! il est dit que ce page

Marguerite, Raoul, Urbain
<- Seigneurs, Dames, Saint-Bris, De Nevers, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, Quelques demoiselles d'honneur
Le chœur, Marguerite
Honneur à la plus belle !
Marguerite, Raoul, Urbain, Seigneurs, Dames, Saint-Bris, De Nevers, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, Quelques demoiselles d'honneur
<- Marcel

Ah ! qu'est-ce que j'apprends ? Vous avez recherché

Marguerite, Raoul, Urbain, Seigneurs, Dames, Saint-Bris, De Nevers, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, Quelques demoiselles d'honneur, Marcel
<- Le valet
Marguerite, Raoul, Urbain, Seigneurs, Dames, Saint-Bris, De Nevers, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, Quelques demoiselles d'honneur, Marcel
Le valet ->

[N. 12 - Finale]

Et maintenant à votre vue

Marguerite, Raoul, Urbain, Seigneurs, Dames, Saint-Bris, De Nevers, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, Marcel
Quelques demoiselles d'honneur ->
Marguerite, Raoul, Urbain, Seigneurs, Dames, Saint-Bris, De Nevers, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, Marcel
<- Valentine, Quelques demoiselles d'honneur

(Valentine est couverte d'un voile blanc)

Votre compagne, la voilà;

Saint-Bris, De Nevers, Valentine, Raoul
Ah ! je tremble et frémis et de honte et de rage
Marguerite, Marcel, Le chœur, Raoul, Valentine, De Nevers, Saint-Bris
Ô transport ! ô démence ! et d'où vient cet outrage ?
Marguerite, Raoul, Urbain, Seigneurs, Dames, Seigneurs protestants, Théligny, Damville, De Guerchy, Demoiselles d'honneur, Marcel, Quelques demoiselles d'honneur
Saint-Bris, De Nevers, Valentine ->

[N. 8 bis - Rondo du page]

 
Scène première Scène deuxième Scène troisième Scène quatrième Scène cinquième Scène sixième Scène septième Scène huitième Variante
Une salle du château du comte de Nevers. Au fond, de grandes croisées ouvertes laissent voir des jardins... Le château et les jardins de Chenonceaux. Le Pré-aux-Clercs, qui s'étend jusqu'aux bords de la Seine. À gauche, sur le premier plan, un cabaret où... Un appartement dans l'hôtel du comte de Nevers. Des appartements dans l'hôtel de Sens Un cloître. - Au fond un temple protestant Une vue d'un quartier de Paris en 1572.
[N. 1 - Ouverture et Introduction] [N. 2 - Scène et Romance] [N. 3 - Scène et Choral] [N. 4 - Scène et Chanson huguenote] [N. 5 - Morceau d'ensemble] [N. 6 - Final] [N. 7 - Entr'acte et Air] [N. 8 - Chœur des baigneuses (dansé)] [N. 9 - Scène du bandeau] [N. 10 - Duo] [N. 11 - Récitatif et Entrée de la cour] [N. 12 - Finale] [N. 8 bis - Rondo du page] [N. 13 - Entr'acte et Chœur] [N. 14 - Couplets, Litanie et morceau d'ensemble] [N. 15 - Ronde bohémienne] [N. 16 - Ballet - Scène] [N. 17 - Couvre-feu] [N. 18 - Scène et Duo] [N. 19 - Septuor du duel] [N. 20 - Chœur de la dispute] [N. 21 - Finale] [N. 22 - Entr'acte Récitatif et Scène] [N. 23 - Conjuration et Bénédiction des poignards (Morceau d'ensemble)] [N. 24 - Gran duo] [N. 25 - Entr'acte et Ballet] [N. 26 - Récitatif et Air] [N. 27 - Scène et Grand trio] [N. 28 - Scène finale]
Acte premier Acte troisième Acte quatrième Acte cinquième

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